L’obligation de sortie conjointe est une clause fréquemment stipulée dans les pactes d’associés qui a pour but de permettre à un associé majoritaire ou un groupe d’associés formant une majorité de céder leurs titres à un tiers en contraignant les autres associés, souvent minoritaires, à céder également leurs titres au tiers au même prix et sous les mêmes conditions.
En d’autres termes, le ou les bénéficiaire(s) de la clause peut entrainer les autres associés à sortir en même temps que lui de la société, d’où l’appellation anglaise de clause « drag along » également intitulée « clause d’entrainement » en droit français.[1]
L’objectif poursuivi est d’éviter que les associés minoritaires puissent faire échec à une vente de la société qui aurait été acceptée par une large majorité des associés. Cela permet de s’assurer notamment que 100% des actions pourront être vendues en cas d’offre de rachat portant sur l’intégralité des titres, les acquéreurs étant rarement intéressés pour racheter uniquement 90% d’une société, ou alors à un prix nettement inférieur. Il s’agit donc avant tout de protéger la valeur future de la société et de s’assurer une meilleure liquidité des actions.
Cette clause est souvent prévue en miroir d’un droit de sortie conjointe (« tag along », appellation phonétiquement assez proche, à ne pas confondre…) stipulé au profit des associés minoritaires leur permettant de sortir, totalement ou partiellement, en même temps que l’associé majoritaire et aux mêmes conditions, si celui-ci venait à vendre tout ou partie de ses actions.
En pratique, certains garde-fous sont prévus pour éviter l’usage abusif du droit d’entrainement par les associés majoritaires au détriment des associés minoritaires pour éviter soit une manœuvre de concert[2] visant au rachat des associés minoritaires via une offre d’un acquéreur de mauvaise foi (homme de paille du majoritaire) soit une cession à prix sous-évalué.
Il est ainsi usuel de prévoir plusieurs conditions cumulatives pour que le drag along puisse être déclenché :
- Une offre reçue d’un tiers portant sur une certaine quotité de titres (cession du contrôle à minima et souvent 100%) ;
- Un certain nombre d’associés représentant une forte majorité du capital ayant accepté l’offre de rachat du tiers (en général fondateurs + investisseurs principaux). Les investisseurs demandent souvent que la majorité retenue leur confère de fait un droit de véto collectif[3].
D’autres conditions peuvent également être prévues comme un prix plancher devant être proposé par le tiers ou encore un prix qui ne peut être inférieur à une offre de rachat précédemment faite par les fondateurs et qui aurait été refusée par les investisseurs (« right of first offer »).
Dans certains cas, assez rares, l’associé minoritaire peut également exercer son droit de préemption et racheter lui-même l’ensemble des actions au prix proposé par le tiers.[4]
Concrètement, si les conditions requises sont remplies, les associés souhaitant céder leurs actions au tiers acquéreur devront notifier aux autres associés leur intention de lever la promesse de vente consentis par ces derniers à leur profit et acquérir ou faire acquérir par le tiers leurs actions aux même prix et conditions. A défaut, la vente ne pourra avoir lieu.
La clause d’entraînement est cruciale pour garantir que l’ensemble des associés vendront le jour J en cas d’Exit. Le marché des Exit étant peu propice en France il serait particulièrement dommage de rater une belle opportunité du fait de quelques minoritaires récalcitrants auquel il serait alors conféré un pouvoir de nuisance pour le moins exhorbitant.
Question à se poser :
- Quels sont les cas dans lesquels il est nécessaire de pouvoir déclencher le drag along ?
- Au regard de la table de capitalisation quel est le seuil de déclenchement permettant d’entraîner la cession ?
- Quel associé ou groupe d’associés aura la main sur l’obligation de sortie conjointe ?
[1] ‘Clause de sortie conjointe’, Dictionnaire Permanent Droit des affaires, Concert, Dalloz documentation, n°24, juin 2020.
[2] Article 233-10 du Code de Commerce.
[3] Galion Term Sheet Illustrated – Drag Along p .21.
[4] François Xavier Testu, Clause de sortie conjointe : drag along et tag along, Dalloz référence Contrats d’Affaires, 2010, chapitre 83.